samedi 31 janvier 2015

____ La jeune fille brûlée au Napalm ____ - Auteur : Nick Ut



Bonjour à tous et à toutes,

Dans un but d'enrichir ma culture personnelle en photographie, je vous propose, désormais, des analyses d’œuvres plus ou moins connues basées sur une recherche approfondie concernant ces derniers et le monde qui l'ont entouré.

Pour commencer, j'ai choisi cette oeuvre qui est une photographie prise par le photographe journaliste vietnamien : Nick Ut. Pourquoi cette oeuvre? Tout simplement que c'est une grande photo de part l'impact qu'elle a eu sur les personnes l'ayant visualisées et étant en partie d'origine vietnamienne moi-même, je souhaitais rendre hommage à mon pays d'origine.

Titre : La jeune fille brûlée au Napalm
Auteur : Nick Ut
Lieu : Village de Trang Bang au Vietnam
Date : 18 juin 1972


Contexte!!

Afin de mieux comprendre l'oeuvre, voici le contexte historique dans lequel cette photo a été prise.

Après la première guerre d'Indochine et l'échec de la France pour reconquérir l'Indochine à la suite de la victoire du Viêt Minh à la bataille de Diên Biên Phu me 7 mai 1954, les accords de Genève mettent fin à la guerre d’Indochine et divisèrent le pays en deux zone démilitarisée au niveau du 17e parallèle. Au Nord, s’impose un régime appuyé par l’URSS et la Chine, le Vietminh, tandis qu'au Sud une dictature pro-américaine, la République du Vietnam. Contre celle-ci se développe une opposition communiste, le Viêt-Cong, soutenue par le Nord qui veut réunifier le pays. En l’absence de tout dialogue entre ces deux Vietnam, la réunification du pays prévue par les accords de Genève, ne peut avoir lieu. L’intervention
américaine au Vietnam débute en 1964, à la suite d’un incident naval avec la flotte nord-vietnamienne. Les Etats-Unis procèdent à des bombardements massifs sur le nord. Progressivement, ils interviennent aussi à terre. Les effectifs américains ne vont cesser
d’augmenter. Le conflit, limité dans un premier temps à une guérilla, prend progressivement l’aspect d’une guerre conventionnelle, qui s’enlise peu à peu. L’utilisation d’armes terribles comme le napalm et les armes chimiques (l'agent orange) entraîne de très nombreuses victimes, le plus souvent civiles.
Le conflit est très médiatisé. Les images envoyées par les reporters choquent par leur violence la société américaine et l'opinion internationale. L’opposition à la guerre s’organise aux Etats-Unis
(manifestations étudiantes et pacifistes). Nixon parvient enfin à mettre un terme au conflit avec les accords de Paris en 1973. Cette guerre s’achève par une victoire des communistes qui font la conquête de l’ensemble du pays en 1975. Le pays est officiellement réunifié en 1976. Les Etats-Unis sortent humiliés de cette guerre. Il s’agit d’une terrible défaite. Un petit pays du tiers monde a défait et ridiculisé la première puissance mondiale. 

Le pays se trouvait donc en pleine période de guerre du Vietnam ou la deuxième guerre d'Indochine. Le 8 juin 1972, le village de Trang Bang, situé sur la route stratégique entre Phnom-Penh et Saïgon, est tenu depuis 3 jours par les troupes du Nord-Vietnam et assiégé par les Sud-Vietnamiens. La plupart des habitants du village ont déjà fui les lieux et se tiennent sur la route, à quelques kilomètres, dans l’espoir de retourner chez eux après la fin des combats. Alors que tout indiquait qu’il n’y avait plus un Nord-Vietnamien dans le village, l’armée sud-vietnamienne (et non les américains) décide néanmoins de bombarder le village au Napalm. Vers midi, le commandant des troupes vietnamiennes demande un appui aérien supplémentaire des forces aériennes du Sud basées à Bien Hoa, à environ 60 km. Les avions arrivent à 13h. Sur la route, aux avant-postes, se tient une petite armada de soldats, de photographes, cameraman et autres journalistes, tous dans l’attente du « spectacle » annoncé... Cette attaque se révèle être une grosse erreur car l'objectif bombardé fut une pagode dans laquelle se sont réfugiée des soldats de l'armée sud-vietnamienne, des femmes, des vieillards et des enfant résidant pour la plupart dans le village déjà ravagé par l'opération Junction City. Ces témoins
« privilégiés » voient s’échapper et courir vers eux des rescapés, pour la plupart grièvement brûlés. C'est dans ces circonstances qu’apparaît apeurée et en larme la petite, Phan Thi Kim Phuc, âgée à ce moment là de 9 ans, également accompagnée de ses frères et deux de ses cousins. Nick Ut se tenait devant avec son appareil photo de marque Leïca prit la photo avant de porter secours aux blessés.

A savoir également concernant le napalm, c'est une substance à base d'essence sous forme de gel qui colle à la peau et brûle les victimes jusqu'aux os sans qu'il soit possible de stopper sa combustion. Inventé en 1942, ce produit ravageur est utilisé dans un cadre militaire, notamment à la fin de la seconde guerre mondiale dans le Pacifique et ponctuellement en Normandie mais également à plus grande échelle pendant la guerre du Vietnam. En 1980, l'usage est interdit contre les populations civiles par une convention des Nations Unies.


Analyse de la photo

Nous pouvons distinguer trois plans sur cette photo : le premier avec les enfants, le deuxième avec les trois soldats américains et le dernier avec la fumée noir opaque de l'incendie qu'a provoqué le bombardement au Napalm vers laquelle la route se dirige. La jeune fille se trouve au centre de la photographie. L'emplacement des quatre premiers enfants dont une impression de mouvement vers nous, qui regardons la photo. Les soldats forment une ligne de barrage. La couleurs des vêtements des enfants peuvent inspirer l'innocence et la pureté en contradictoire avec les soldats qui sont eux en gris, couleur du métal, pouvant représenter la force mais aussi la mort. La noirceur de la fumée envahie peu à peu le ciel de couleur blanchâtre.

Au premier plan, notre regard est attiré sur les enfants. Le plus grand au premier plan qui ouvre le passage vers l'avant pour ses cadets qui eux se place du plus âgé au moins âgé. Au centre de la photo, nous pouvons voir la petite Phan Thi Kim Phuc, 9 ans à ce moment là. Elle est nue car elle s'est débarrassée de ses habits qui se consumait et a les bras étendus car des lambeaux de peau tombent quand elle passe sa main sur elle. Elle est brûlée par le napalm, mais ses pieds ne sont pas touchés, elle peut courir, elle hurle de douleur. La photo telle qu'elle est parue a été recadrée pour lui donner plus de force. C'est pour cela que la fillette se retrouve au centre de la composition alors que sur l'original, elle est sur la gauche de la photographie.




A gauche nous pouvons voir son frère, Phan Thanh Tam, 12 ans et blessé à un œil, sur son visage s’inscrit les sentiments de souffrance et de peur. Derrière Kim Phuc, son petit frère de 5 ans en chemise blanche qui n'est pas gravement blessé. A droite de la photo ses cousins, un garçon et une fille ainsi qu'un photo reporter qui recharge son appareil (David Burnette de Time Magazine).

Ces derniers sont encadrés par des soldats et journalistes habillés en kaki comme pour fermer la marche et protéger les enfants de la fumée menaçante que dégage l'incendie provoqué par le bombardement au napalm.

Néanmoins, cette oeuvre peut avoir une tout autre interprétation. LA photographie est recadrée par Nick Ut pour lui donner l'aspect d'une crucifixion en tous points similaire aux canons de la peinture classique d'Andrea Mantegna.



Le Christ, dévêtu et central, y est généralement entouré des deux larrons, pendant que des centurions impassibles se livrent à une partie de dés. Ici, c'est la jeune fille qui occupe le centre de l'image. Elle est nue, les bras tendus, comme crucifiée, martyre de la guerre. Elle est encadrée à sa gauche et à sa droite par d'autres enfants dans la même situation qu'elle. Derrière eux se tiennent des militaires distants.


Histoire de la photo et de sa publication
Après avoir pris le cliché, Kim Ut a porté secours aux enfants et leurs familles en les emmenant à l’Hôpital. 


La photographie a failli ne pas être publiée car un débat a eu lieu au sujet de sa parution. Cette photo montre une enfant nue de face ce que le responsable de l'AP à Saïgon jugeait indécent et trop violent pour le public américain. Finalement, elle ne paraît que le 12 juin 1972 dans le NEW YORK TIMES. L'impact de la photographie est immédiat et considérable mais celle-ci ne change pas le cours de la guerre. Il est vrai qu'à ce moment là, le grand public était déjà convaincu de l'horreur de la guerre et qu'il souhaitait l'arrêt de cette guerre. La photo ne fait que confirmer un discours préexistants. Elle est néanmoins devenue un symbole, à la fois de la lutte contre la guerre, et de la représentation de la souffrance.




Phan Thi Kim Phuc après la photographie

Les médecins qui ont soigné Kim Phuc ne croyaient pas qu'elle survivrait à ses blessures. Des brûlures au troisième degré couvraient la moitié de son corps. Dix-sept opérations ont été nécessaires pour lui redonner une vie digne d'être vécue. Elle a passé 14 mois à se rétablir de ses blessures au Barsky Hospital, l'hôpital américain de Saïgon, où le coût de ses soins a été pris en charge par une fondation privée. Le gouvernement vietnamien soumit Kim à d'interminables interrogatoires, les chefs communistes lui avaient ordonné de venir à Ho Chi Minh Ville pour être la protagoniste de leurs films de propagande. Elle fut forcée d'abandonner l'école et de retourner dans sa province où, en tant que symbole de guerre national , elle fut soumise à une surveillance quotidienne. En 1986, Kim eut l'occasion d'aller étudier à Cuba, mais ses études durent de nouveau être interrompues à cause d’un diabète qui lui brouillait la vue. Pendant son séjour à Cuba, elle fit la connaissance d'un compatriote étudiant du nom de Bui Huy Toan. Ils se marièrent en 1992 et passèrent leur voyage de noces à Moscou. De retour à Cuba, le couple réussit à s'enfuir au cours d'une escale de ravitaillement à Gander, Terre-Neuve. Avec l'aide de Quakers, ils s’établirent tous deux au Canada qui leur accorda l’asile politique, le mari de Kim, spécialiste en informatique, réussit à se trouver un emploi comme aide-infirmier auprès de personnes handicapées. En Novembre 1997 Kim Phuc fut nommée ambassadeur de bonne volonté de l'Organisation des Nations Unies pour la science et la culture (UNESCO). Elle a également créé la Fondation Kim pour la guérison des enfants de la guerre avec des bureaux à Ajax, en Ontario, au Canada et Chicago, financée par des dons privés. Elle n’est pas revenu au Vietnam depuis son départ en 1986. Elle vit maintenant avec son mari Bui Huy Toan, ses deux garçons Thomas et Stephen dans un petit appartement à Toronto, Canada où ses parents l’ont rejoint. 




Présentation du photographe : Kim Ut

Nick Ut Cong Huynh, aussi connu sous le nom de Huynh Công Ut, est un photojournaliste vietnamien né le 29 mars 1951.

Nick Ut est lauréat du World Press Photo 1972 pour sa photo de Kim Phuc, enfant terrorisée souffrant de grave brûlures au napalm. Cette image, prise le 8 juin 1972, est l'une des plus célèbres de la Guerre du Vietnam. Nick Ut était alors présent au Vietnam pour le compte de l'agence Associated Press, par qui il avait été embauché à l'âge de 16 ans, suite au décès de son frère, photographe au sein de la même agence. A son entrée à Associated Press, il fut pris sous l'aile du photographe de guerre Horst Faas qui fût déterminant pour faire publier la photo de Kim Phuc malgré la censure sur les photos représentant de la nudité infantile. 

Nick est lauréat du prix Pulitzer du journalisme en 1973.

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